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Vie Sauvage – Cédric Kahn

Qu’est-ce qu’on a voulu? On avait 7 et 8 ans. Dis moi ce que l’on choisit quand on a 7 et 8 ans? Et en effet, on ne choisit pas à cet âge là, on subit. La violence de la séparation de parents qui pourtant au départ s’accordaient sur une vie nomade, la déchirure d’enfants écartelés entre un père (Paco) ayant définitivement adopté le mythe du bon sauvage et une mère (Nora) que gadoue, galères et caravane commencent à révulser.

Épuisé de vivre dans un monde où la société des hommes n’accorde aucun crédit à la « justice familiale » et regarde – du haut de ses lois – le monde marginal comme un danger ultime pour l’éducation, Paco décide alors d’arracher ses enfants au sein maternel et à la sphère sociale pour une cavale qui durera plus de 10 ans.

10 ans de clandestinité pour apprendre à ses fils les valeurs simples d’une vie en harmonie avec la nature loin de la société marchande. 10 ans surtout dans la fuite permanente, loin d’une mère que l’on rêve éveillé, dont on entend le son de voix dans le bruissement des feuilles, dont on perçoit la silhouette dans les bois au petit matin, que l’on ressent dans ses tripes jusqu’à vouloir la vomir parce qu’au fond l’absence déchire. Le silence ronge. Le silence de cette mère meurtrie, disparue de l’écran, hurle dans le film de Kahn. Seules quelques coupures de journaux pour nous rappeler son existence et son combat.

Pour autant Cédric Kahn ne prend parti ni pour ce père radical et profondément anti-système, ni pour cette mère dont la décision de rupture avec un mode de vie qu’elle ne souhaitait plus pour elle et ses enfants alimentera une spirale de douleur, d’angoisse et de colère. Et si vivre dans la nature, apprendre à chasser, produire sa propre nourriture et observer les feuilles pousser peut être un idéal de vie, il atteint ses limites. Celle de l’adolescence rebelle en lutte contre les choix de vie imposés, celle de l’adolescence fragile en quête de « normalité », de reconnaissance sociale au sein du groupe.

On a pas choisi, qu’est-ce que l’on choisit à 7 et 8 ans? Alors en immersion réelle dans la peau de ces gosses, on s’emmerveille de pouvoir caresser l’oiseau sur sa branche, on ressent la douleur du percing dans l’oreille, on saute de joie avec les néo-hippies au coin du feu les soirs de pleine lune. Puis on commence à vouloir planter Paco un peu trop rigide et dirigiste. Mais plus que tout on comprend surtout pourquoi malgré toutes les souffrances endurées par la mère on aspire qu’à une seule chose : qu’elle accepte de sauver le père de la punition que la société ne manquera pas de lui infliger quitte à ce qu’elle en arrive elle à renier son combat d’une vie. Une scène finale remarquable, des acteurs extraordinaires, un vrai coup de cœur.

Commentaires

  1. Avatar de My Little Discoveries

    Je compte bien aller voir ce film, merci pour cette chronique!

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